Formalisation ou non d’une évaluation environnementale : le choix appartient aux collectivités

Les nouvelles règles d’évaluation environnementale des documents d’urbanisme ont été fixées par un décret du 13 octobre 2022. Certaines dispositions de ce texte prévoient les cas dans lesquels les collectivités territoriales peuvent, elles-mêmes, déterminer par un examen au cas par cas, si leur projet d’élaboration ou d’évolution de leur document d’urbanisme doit faire – ou pas – l’objet d’une évaluation environnementale.
 
Si, aux termes d’une décision du 23 novembre 2022, le Conseil d’État a refusé d’annuler ces dispositions, l’opportunité de soumettre un projet d’élaboration ou d’évolution d’un document d’urbanisme à une évaluation environnementale relève du pouvoir discrétionnaire de la collectivité territoriale à l’origine dudit projet CE, 23 nov. 2022, n° 458455.

Pris en application de la loi « Asap » du 7 décembre 2020, le décret n° 2021-1345 du 13 octobre 2021 (portant modification des dispositions relatives à l’évaluation environnementale des documents d’urbanisme et des unités touristiques nouvelles : JO 15 oct. 2021) avait fixé les obligations d’évaluation environnementale des documents d’urbanisme comblant ainsi un vide laissé par deux jurisprudences du Conseil d’État (CE, 19 juill. 2017, n° 400480. – CE, 26 juin 2019, n° 414931).

Ainsi, une « personne publique responsable » peut décider de réaliser une évaluation environnementale lorsqu’elle estime que l’élaboration de sa carte communale, la création ou l’extension d’une unité touristique nouvelle (UTN) ou l’évolution de son schéma de cohérence territoriale (SCOT), de son plan local d’urbanisme (PLU ou PLUI) ou de sa carte communale est susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement.

Inversement, si cette même « personne publique responsable » estime que le document d’urbanisme en question n’est pas susceptible d’avoir des incidences notables sur l’environnement, rien ne l’oblige à réaliser une évaluation environnementale : c’est ce que confirme le Conseil d’État dans son arrêt en date du 23 novembre 2022 susvisé.

In fine, les conséquences du maintien des dispositions du décret n° 2021-1345 du 13 octobre 2021 doivent être réinterprétées car, le Conseil d’État relève que l’évolution ou l’élaboration d’un document d’urbanisme ne pourra être dispensée de la réalisation d’une évaluation environnementale si l’autorité environnementale, saisie pour avis conforme, s’y oppose.

Il reste que la « personne publique responsable » devra rendre une décision expresse motivée, exposant les raisons pour lesquelles une évaluation n’a pas été regardée comme nécessaire, dans l’hypothèse où, au terme d’un délai de 2 mois à compter de sa saisine, l’autorité environnementale est réputée avoir rendu un avis favorable tacite.

Espaces boisés classés : une étude attentive des caractéristiques des parcelles

Dans sa décision du 13 décembre 2022, le Conseil d’Etat s’est livré au contrôle de l’erreur manifeste d’appréciation susceptible d’entacher un plan local d’urbanisme.
 
La Haute juridiction a estimé que des parcelles arborées n’avaient pas à être classées en espaces boisés compte tenu de l’absence de leur classement dans le précédent plan d’occupation des sols et du fait qu’elles constituaient un ensemble hétérogène partiellement construit.
 
Il en résulte que les auteurs d’un plan local d’urbanisme doivent étudier précisément les caractéristiques des parcelles avant de déterminer si elles relèvent ou non d’un classement en  « espaces boisés classés » répondant à la définition donnée par l’article L.113-1 du code de l’urbanisme.
 
Conseil d’Etat, 5ème chambre, 13 décembre 2022, n°451577 (https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000046737256?dateDecision=&init=true&page=1&query=%22article+L113-1%22+du+%22Code+de+l%27urbanisme%22&searchField=ALL&tab_selection=cetat)

Modifications commande publique 2023

Le décret n°2022-1683 du 28 décembre 2022 portant diverses modifications du code de la commande publique :

  • prolonge de deux ans, jusqu’au 31 décembre 2024, la dispense de procédure de publicité et de mise en concurrence préalables pour les marchés publics de travaux de moins de 100 000 € HT, initialement prévu par la loi ASAP du 31 décembre 2022 ;

  • augmente le montant minimum de l’avance versée au titulaire pour les marchés de l’Etat conclus avec des PME de 20 à 30 % et précise les modalités de remboursement des avances ;

  • modifie les articles R. 2432-3 et R. 2432-pour préciser que le dépassement des engagements du maître d’œuvre sur le coût prévisionnel des travaux ou le coût résultant des marchés de travaux ne peut conduire à le pénaliser que si ce dépassement lui est imputable ;

  • autorise les candidats à transmettre une copie de sauvegarde de leur offre par voie dématérialisée, selon des modalités renvoyées à un arrêté à paraître ;

  • Enfin, il prévoit les mesures d’application de l’article 19 de l’ordonnance n°2022-1336 du 19 octobre 2022 qui crée un nouveau cas de réservation des marchés publics et des contrats de concession pour les entreprises implantées en milieu pénitentiaire et employant des personnes détenues. A ce titre, le décret fixe à 50 % la part minimale de personnes détenues devant être employées dans ce cadre.

L’arrêté du 29 décembre 2022 modifiant les cahiers des clauses administratives générales des marchés publics :

  • Modifie le CCAG pour tenir compte des dispositions du décret du 28 décembre 2022 relevant le taux d’avance minimum ;

  • Prévoit des dispositions pour mieux maîtriser le délai entre la notification d’un marché et l’ordre de service de démarrage effectif des travaux :il réduit à cet effet de 6 mois à 4 mois
    • le délai prévu à l’article 50.2.1 du CCAG relatif au cas de droit à résiliation du marché pour ordre de service tardif,
    • le délai, prévu à l’article 18.1 du même cahier, à partir duquel le titulaire peut se prévaloir d’un préjudice à ce titre.

Deux arrêtés du 1er janvier 2023 fixent les modalités de publication des données essentielles des marchés publics et des contrats de concession

  • Le premier précise la liste des formats, normes et nomenclatures dans lesquels les données essentielles des marchés publics doivent être publiées ainsi que les modalités de leur publication ou de communication.

Le second, donne les mêmes informations concernant les contrats de concession.

Cas d’une commune refusant de régulariser un permis lors de l’instance dirigée contre celui-ci

Société civile de construction vente Lucien Viseur

Si une commune refuse de délivrer le permis de construire modificatif sollicité par le requérant, le juge doit considérer que la régularisation n’est pas intervenue et il doit annuler le permis initial.

 

En application de l’article L. 600-5-1 du Code de l’urbanisme, le juge administratif, lorsqu’il est saisi d’un recours dirigé contre un permis de construire, peut surseoir à statuer et accorder un délai au pétitionnaire et à la commune pour régulariser une illégalité qui aurait été décelée dans l’autorisation.

Concrètement, dans le délai imparti par la juridiction, le pétitionnaire doit déposer une demande de permis modificatif destinée à « purger » le dossier de l’illégalité qui a été identifiée.

Toutefois, lorsque le juge recourt à l’article L. 600-5-1 du code de l’urbanisme et qu’aucune mesure de régularisation du permis de construire ne lui est notifiée, il lui appartient de prononcer l’annulation de l’autorisation de construire litigieuse, sans que puisse être contestée devant lui la légalité du refus opposé, le cas échéant, à la demande de régularisation présentée par le bénéficiaire de l’autorisation.

Il en résulte que si une commune refuse de délivrer le permis de construire modificatif sollicité, le juge doit considérer que la régularisation n’est pas intervenue et il doit annuler le permis initial.

La contestation par le pétitionnaire ne peut, alors, intervenir que dans le cadre d’une nouvelle instance et doit être regardée comme dirigée contre le refus d’autoriser le projet dans son ensemble, y compris les modifications qu’il était envisagé d’y apporter. 

Rappel des règles contentieuses pour les jugements concernant des permis de construire dans les zones dites « tendues »

Par une ordonnance du 1er septembre 2021, le Conseil d’Etat précise que dans les zones tendues, seuls les recours contre les permis de construire de « bâtiment à usage principal d’habitation » sont rendus en dernier ressort, ce qui n’est pas le cas d’un bâtiment à usage de bureaux !

L’article R. 811-1 du code de justice administrative fixe une liste de matière dans lesquelles les jugements sont rendus en premier et dernier ressort (par exemple en matière de permis de conduire ou de contentieux CAF ou Pole emploi).

De plus, l’article R.811-1-1 du même code rajoute que « les tribunaux administratifs statuent en premier et dernier ressort sur les recours contre les permis de construire ou de démolir un bâtiment à usage principal d’habitation ou contre les permis d’aménager un lotissement lorsque le bâtiment ou le lotissement est implanté en tout ou partie sur le territoire d’une des communes mentionnées à l’article 232 du code général des impôts et son décret d’application, à l’exception des permis afférents aux opérations d’urbanisme et d’aménagement des jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 mentionnées au 5° de l’article R. 311-2.»

Cet article supprime donc la voie de l’appel en matière de recours contre les permis de construire portant sur un bâtiment à usage principal d’habitation et contre les permis d’aménager situés sur les communes en zone « tendue » (c’est-à-dire celles appartenant à une zone d’urbanisation continue de plus de 50.000 habitants, connaissant des difficultés d’accès au logement), le seul recours possible restant désormais le pourvoi en cassation devant le Conseil d’Etat.

Par une ordonnance du 1er septembre 2021 n°450152, le Conseil d’Etat a précisé que la voie de l’appel demeure ouverte s’agissant d’une demande tendant à l’annulation de l’arrêté litigieux du maire de Marseille délivrant un permis de construire relatif à la construction d’un immeuble de bureaux à Marseille et renvoie donc l’affaire devant la Cour administrative d’appel de Marseille.

Ordonnance du Conseil d’Etat n°450152 du 1er septembre 2021